"Une course effrénée"
"Une course effrénée"
Les temps sont devenus plus difficiles depuis la crise financière de 2008, constatent Eric de Beukelaer, vicaire épiscopal du diocèse de Liège et Bruno Colmant "Head of macro research" chez Degroof Petercam, dans leur livre "Le prêtre et l'économiste". Lors de la présentation de leur ouvrage ce mercredi au siège de la banque Degroof Petercam à Luxembourg, ils ont souligné la grande transformation des 40 dernières années, par laquelle le capitalisme à visage humain a disparu au profit d'un système financier anglo-saxon dont la vision est essentiellement court-termiste.
"Nous sommes aujourd'hui dans une logique où l'on doit interpréter le futur pour bénéficier du présent. Cela veut dire que nous sommes dans un rapport avec le futur qui est très volatil parce que le futur ne nous appartient pas", indique Bruno Colmant. Selon lui, "on n'a pas tiré la synthèse de cette espèce d'emprunt effréné" alors qu'on devrait "se réapproprier le rythme du temps".
Eric De Beukelaer souligne aussi la difficulté de l'être humain à penser aux conséquences à long terme. "Aujourd'hui si on veut vraiment jouer le jeu du marché, il faut que le coût de chaque chose que l'on utilise soit vraiment pris en compte. Le juste prix doit ainsi intégrer les coûts de pollution", indique-t-il.
"Frénésie capitalistique"
Le capitalisme d'aujourd'hui a provoqué, selon les deux auteurs, des déséquilibres qui ont amené la population à un grand sentiment de colère et des manifestations de populisme. "Ce qui est interpellant, c'est cette espèce de frénésie capitalistique qui fait qu'on spécule pour éviter la spéculation, on mondialise pour éviter la mondialisation, on gagne du temps parce qu'on a peur d'en perdre. Quand on transpose cet état d'énervement au niveau sociétal, on voit apparaître ces fameux populismes, quelles qu'en soient les significations", souligne Bruno Colmant.
Et d'ajouter: "la difficulté, c'est qu'on ne peut pas aborder ces problèmes de manière uniquement instantanée, cela demande d'avoir une projection du cadre sociétal et humaniste dans lequel on veut vivre dans le futur. Or, je crains que l'humain ne soit pas en situation de pouvoir tempérer cette course qui est en train de s'accélérer et qui conduit finalement à une collision."
Le drame que nous vivons, et l'Église catholique le dit depuis 60 ans, c'est que nous avons une économie mondialisée qui a sa propre logique et qu'il n'y a pas de pouvoir politique capable de la canaliser. Je ne demande pas un gouvernement mondial, mais un arbitre mondial.
Selon Eric De Beukalear, "il faut remettre chaque chose à sa place" et il utilise pour cela une image, celle de la Meuse. "L'eau qui coule du fleuve, c'est comme le marché libre: on ne peut pas faire comme s'il n'existait pas. Pendant des siècles on a creusé la Meuse, on a mis des berges, des écluses, on a canalisé le fleuve pour qu'il soit l'allié de l'être humain. Le marché libre peut aussi être l'allié de l'homme si on le canalise", insiste–t-il.
"Le drame que nous visons, et l'Église catholique le dit depuis 60 ans, c'est que nous avons une économie mondialisée qui a sa propre logique et qu'il n'y a pas de pouvoir politique capable de la canaliser. Je ne demande pas un gouvernement mondial, mais un arbitre mondial", dit Eric De Beukelaer qui se montre alarmiste: "si on ne le fait pas, soit ça sera l'anarchie la plus grande, soit nous allons tous vivre comme les Chinois avec un État planificateur qui va imposer parce qu'on n'aura plus le choix, soit les États vont démocratiquement se mettre d'accord pour avoir une plus grande régulation, entre autres au niveau écologique".
Mettre en évidence l'intérêt général
"Le progrès aujourd'hui est conditionné par le progrès de mondialisation", indique pour sa part Bruno Colmant. "Nous nous fragilisons nous-mêmes dans un mouvement de mondialisation dont nous ne pouvons finalement pas nous exclure."
Selon lui, pour faire changer les choses, "on devrait mettre en évidence le culte de l'intérêt général. Je pense qu'à titre individuel ou à titre collectif on devrait subordonner toutes nos actions, les plus infimes soient-elles, au bénéfice des futures générations".
La conclusion d'Eric De Beukelaer va dans le même sens: "Quand vous agissez ou quand vous votez, pensez à vos petits-enfants", lance-t-il. "Il faut penser l'avenir. Si à titre personnel on n'a pas le courage de réfléchir aux conséquences de ses actes dans 30 ou 40 ans, on continue tout simplement à faire du court-termisme".
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